jeudi 31 décembre 2015

Les 5 principes (ordre 1 de la construction)

Approche ascendante (Bottom-Up)

Le basculement de la société de consommation vers la société d'information libre a des implications dans tous les domaines. L'accès sans limite aux savoirs permet à l'individu de se positionner, de mesurer à la fois la dimension de l'espace culturel collectif et sa propre part d'originalité ou de conformité. En se différenciant, il prend conscience de sa singularité et apprend à faire un choix moral indépendant. Il découvre l'homogénéité du système, ce qui le conduit à en interroger l'intérêt, voire à imaginer un complot. Individu après individu, le système est interrogé, déconstruit, et les valeurs se ré-élaborent suivant des modalités différentes, passant du Top-Down au Bottom-Up. A l'issue, la morale se détache de la logique abstraite générée par la collectivité pour se recréer dans des frictions inter-individuelles qui mène à se considérer dans une logique d'interdépendances.

Sans le filtre du système, le basculement affecte inévitablement l'espace matériel (celui-ci n'étant qu'une distinction pédagogique, destinée à mettre en avant la dissymétrie actuelle entre la disponibilité des informations et l'appropriation des matières). De fait, sans la maîtrise de la communication, la valeur d'un bien n'a plus aucun sens et l'appropriation se trouve à son tour sans objectivité. Élargissement de la notion d'abstraction à la matière,  Si le dix-neuvième siècle et le capitalisme ont été marqué comme la mise en abstraction de la matière, il est très probable que vingt-et-unième sièle sera à l'inverse une matérialisation de l'abstrait. Il y aura une re-matérialisation des savoirs.
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Si l'architecture semble peu créative, c'est qu'elle s'est éloignée de la construction. Celui qui orchestrait les corps de métiers n'est plus qu'un "optimiseur" prisonnier entre les contraintes normatives, les calculs de RDM et les produits préfabriqués. Cet architecte ne sera bientôt plus qu'un logiciel. C'est par la construction que le métier va pouvoir renaître, en contact avec la réalité du terrain. Personne ne pourra éviter une transformation en profondeur de la construction moderne. La demande évolue. Les monuments gigantesques et abstraits ne séduisent plus. Les dépenses pharaonesques figurent des gaspillages financiers au profit de quelques riches, ceci au détriment de tous les autres et des biens communs. Si l'on souhaite que l'esprit d'invention de la modernité puisse survive, il faut enfin conscientiser les impacts de nos gestes créatifs.


1.1 Intelligibilité : une construction compréhensible
Pour juger une construction, il faut pouvoir l'observer et surtout la comprendre : celui qui construit, celui qui passe, celui qui vit. Chaque élément architectural possède une consistance et un rôle, cette consistance (matérialité) et ce rôle (support, protection, circulation) seront compréhensible afin que chacun puisse juger la qualité de la construction. L'intelligibilité n'est pas la fonctionnalité : elle ne concerne pas la fonction mais la construction, car l'usage doit pouvoir changer, le bâtiment sachant traverser les temps sans que la construction soit modifiée en profondeur.

1.2 Civilité : une architecture du devoir plus que du pouvoir
L'architecture se doit d'obéir aux règles de la vie en communauté. Elle doit avoir conscience de sa dimension morale et sociale, de son rapport à l'altérité. L'architecture du "pouvoir" qui s'est imposée au cœur du mouvement moderne peut s'allier à l'architecture du "devoir", civil et moral. Ainsi, le paysage est autant celui vu depuis l'intérieur que celui imposé aux observateurs du dehors. Le respect des autres consiste à ne pas imposer un objet considéré collectivement comme laid, non obligatoirement dans le moment immédiat mais plutôt dans l'avenir. Ce qui implique une intelligence extraordinaire de l'architecte, capable de deviner le regard du futur.

1.2 Moralité : peu d'énergie, peu de matière, beaucoup de satisfaction
Parmi les expressions morales de l'architecture, la prospective écologique se place au premier plan. Elle impose de faibles énergies d'investissement (dites grises, qui se réduisent en fonction de la durabilité du bâtiment) et de fonctionnement (consommation). Cette réduction implique au second degré une réduction optimale des matières, des transformations, des déplacements. Poussé à son paroxysme, en considérant l'homme comme adhérant pleinement à l'environnement, l'optimisation des matières peut être interprétée comme une satisfaction des hommes : le plaisir de l'ouvrier qui construit, de l'architecte qui dessine, du maître d'ouvrage qui finance, de l'homme qui y vivra immédiatement ou dans un avenir plus lointain.

1.3 Matérialité : une matière apparente
L'architecture s'est développée dans son histoire sur le mode d'une conception abstraite de l'espace et de son usage, elle a préféré les sciences sociales aux arts appliquées. Elle peut donc se réduire à une sorte d'orchestration des différentes techniques que l'architecte peut ignorer (comme un chef d'orchestre qui peut théoriquement ne pas maîtriser un instrument). Toutefois, la construction ne peut ignorer les conditions matérielles. La matière est la condition première de la construction. Contre une architecture d'emballage, un langage communicant, qui ment et cache la matière réelle (celle qui porte et celle qui protège), une construction assumée offre une matière visible et valorisée.

1.5 Originalité : prôner l'invention
Les règles précédentes sont des conditions préalables imposées par le principe de "devoir" appliqué à la construction mais ceci n’empêche pas l'invention. La civilité ne se réduit pas une politesse : respecter un environnement n'oblige pas à faire du régionalisme, respecter la matière ne conduit à refuser des matériaux nouveaux, etc. L'homme invente. L'invention participe pleinement au plaisir qui sera la seule condition de la nouvelle construction, celle qui permettra de dépasser l'état actuel d'une architecture de frustration qui s'impose à tous, du créateur à l'usager.

NOTE :
* L'indépendance de l'individu relativement au système provoque une conscience d'individualité mais elle révèle aussi la présence d'un système bien cohérent, d'une apparence tout puissante. Chacun peut croire, en un premier temps, à un "complot" alors qu'il s'agit tout simplement d'un enfermement culturel qui a fait du système un filtre unique reliant les individus à la collectivité.


Recette : Tournedos Rossini

Recette modifiée selon Wikipedia de Chef Simon - Le Monde

Sommet de la civilisation et du snobisme, si l'on veut manger de la viande... autant y aller vraiment !
  • 4 tournedos très tendres de 3 cm d'épaisseur
  • 4 médaillons de foie gras de 5 à 8 mm d'épaisseur
  • 4 x 3 lamelles de truffes noires
  • 3 dl de fond de veau
  • un petit verre de Madère
  • 4 tranches de pain de mie découpées à l'emporte pièce (sans la croûte)
  • 30 g de beurre pour la cuisson des tournedos - autant pour la cuisson du pain - autant pour la finition de la sauce.
  1. Préparer simultanément les croûtons et les tournedos. Pour cela chauffer calmement le beurre dans les poêles jusqu'à ce qu'il commence à brunir, sans brûler. Je me plais à dire "Cuire le beurre avant de cuire...".
  2. Détailler les médaillons de foie gras et les lamelles de truffes.
  3. Fonds de veau du commerce... Augmentez la proportion d'eau pour opérer une réduction plus longue, les arômes du fond industriel s'estomperont un peu. Y ajouter les brisures des truffes et les parures de foie gras si vous en avez obtenu après la découpe.
  4. Frire les croûtons au beurre et non à l'huile. Inutile de monter la température exagérément, en retournant régulièrement le pain, il croutera en prenant une jolie couleur dorée. Les réserver sur le bord de la poêle et réduire la chauffe au minimum.
  5. Marquer en cuisson les tournedos. On les aura bien salés et poivrés avant.
  6. Marquer en coloration de chaque côté dans la poêle chaude, mais surtout pas brûlante. Vous devez entendre le crépitement. Une fois le marquage effectué, baissez légèrement la température et retourner le tournedos plusieurs fois selon l'appoint de cuisson souhaité.
  7. Lorsque la cuisson est proche de son dénouement final, enlever les ficelles et la barde.
  8. Colorer les côtés et débarrasser les tournedos dans la poêle ayant servi au pain. Les tournedos reposeront en conservant la chaleur.
  9. Récupération des sucs de cuisson. Déglacer avec du Madère. Mouiller avec le fond et monter avec une noix de beurre pour donner de la brillance à la sauce.
  10. La touche du Chef : Poser les croûtons sur des assiettes passées au four réglé à +90°C - Napper le croûton avec un peu de sauce et déposez le tournedos bien chaud, surmontez le du médaillon de foie gras (saisi 15 secondes sur poêle chaude) et disposez les lamelles de truffes. Disposez vos petites garnitures autour et nappez juste le foie gras et les truffes de la sauce bien chaude. Là, c'est Palace !

mardi 29 décembre 2015

Analyse : vers une société d'information

Approche descendante (top-down)

La société d'information

Bien que l'actuelle crise des représentation de la modernité soit nommée "postmoderne", nos modèles cherchent encore à améliorer le partage et l'abondance, se rattachant en droite ligne aux idéaux démocratiques et industriels systématisés en Occident durant les deux derniers siècles. Cependant, malgré cette filiation, une part croissante de la population mondiale préfère revendiquer la "régression", mettant en avant des raisons culturelles (religieuses ou politiques) pour accuser la décadence de l'Occident, le gaspillage des biens communs, et vanter une meilleure qualité de vie dans le passé ou la nécessité de maintenir des traditions pour être heureux. Ces micro-collectivités se fondent souvent sur les derniers outils de communication et un accès indépendant aux savoirs.

Dans une surabondance globalisée de biens et d'informations, il est convenu d'accuser l'industrie de pas produire pour tous et de créer des inégalités, tout en exigeant un changement radical, alors même qu'il signifierait d'abolir jusqu'aux notions de partage et d'abondance... En tant que prolongement des doctrines modernes, cette "crise" apparaît donc plus comme un ressaut hyper-moderne tendant vers le partage optimal des biens au bénéfice de tous. Ce faux-changement prolonge en profondeur les idéaux de la "société de consommation". Toutefois, il n'est plus possible d'ignorer aujourd'hui la position globale de chaque individu au milieu des marchandises et des savoirs : ce point particulier marque le passage de "la société de consommation" vers la "société d'information" où l'accès au savoir ne passe plus par le filtre du système collectif.

Tension entre consommation et information

Le vieux modèle du progrès démocratique (promettant la paix mondiale, la fin de l'histoire, la paix économique grâce à la prospérité industrielle) est entré - l'évidence est criante depuis dix ans - dans une phase critique où la notion de progrès ne semble plus perceptible à l'échelle de l'individu. Le développement d'internet et l'apparition d'une masse d'informations non-contrôlées (à la différence des précédentes périodes de communication ou de propagande) a marqué un changement. Au fur et à mesure que les savoirs se sont démocratisées, l'opacité réelle des produits industriels est apparue comme une évidence. Si les biens et informations sont accessibles à tous, le lien rattachant les deux est impossible à établir à l'échelle de l'individu. La complexité est du système est telle qu'il n'est plus possible de trouver une explication intelligible dans les réseaux d'information.

L'individu ne peut définitivement plus expliquer le fonctionnement et l'origine des objets qui l'entourent et devient dépendant. Il lui faut soit renoncer à comprendre et jouir de l'abondance sans en comprendre les finalité, soit réclamer plus de simplicité pour tenter d'améliorer sa condition propre. De fait, la démocratisation matérielle issue des avancées de l'industrie s'est toujours rattachée à une division du travail (ouvriers) et à une spécialisation dans l'exploitation des données (ingénieurs), qui ont permis de faire progresser chaque sous-élément, mais en perdant de plus en plus la vue l'ensemble. C'est pourquoi le développement industriel, parti d'un idéal démocratique, est finalement devenu un modèle aliénant conduisant à vivre dans un environnement inintelligible, entièrement dépendant d'entreprises et d'experts qui utilisent un matériel spécialisé et un jargon incompréhensibles. L'information n'apporte pas de solution.

La singularité écologique

Le trouble culturel mondial apparaît donc lié à une surabondance d'information conduisant à la formation de niches micro-collectives radicalisées.  Ainsi, l'écologie régressive des années 1970 (qui indique à sa manière le point de départ d'une "crise post-moderne") a été rapidement absorbée par l'hyper-information et l'hyper-spécialisation technique. Restées dans les marges pendant presque trente ans, les théories avancées par les premiers écologistes deviennent des arguments communs que s'approprient les politiques, les industriels et les communicants*. Tout d'abord discrètement, puis de plus en plus bruyamment depuis le milieu des années 2000 (greenwashing), les modes "traditionnels" (comme la terre, le bois et la pierre dans la construction) prennent le dessus sur les "modernes" (béton, fer, verre) alors que leur mise en oeuvre était oubliée depuis presque deux siècles.

Bénéficiant d'un casier vierge aux yeux du public, les matières pré-modernes séduisent les consommateurs en tant que symboles d'alternative et de protestation. Elles sont écologiquement correctes car elles semblent a priori plus simples et plus honnêtes, mais la société d'information va vite polluer cette limpidité apparente. De fait, le bois industriel de construction a une énergie grise comparable à celle du béton armé et une durée de vie mal-connue (alors que l'on peut estimer celle du béton à un siècle). La plupart des isolants thermiques ont un coût environnemental important, peut-être supérieur à leur amortissement. Quant au degré de complexité des équipements techniques dits écologiques (maisons avec pompe à chaleurs, VMC double-flux, panneaux photovoltaïques, etc.), il est tellement élevé qu'il rejoint finalement celui des "boites noires" de l'industrie courante.

Vers une architecture intelligible

Le problème étant de lutter contre la séparation entre les biens et les informations, ni le greenwashing ni les matières écologiquement correctes ne peuvent constituer une réponse. L'architecture moderne est en danger car son idéal de progrès (suivant les possibilités d'invention dans les domaines artistique, technique et écologique) n'est plus compréhensible. La modernisation est aujourd'hui regardée comme un faux-prétexte destiné à généraliser l'industrialisation du monde ; monde dans lequel utilisateur et architectes sont réduits à n'être que des consommateurs comme les autres, de moins en moins créatifs, de plus en plus soumis aux produits qu'ils achètent, addictes des nouveautés présentées dans les salons spécialisés. Un constat partiellement juste dans la mesure où le métier d'architecte s'est détaché de la création matérielle pour devenir uniquement un art de combinaison, oubliant la profondeur technique pour se limiter à un "design industriel", soit à une articulation langagière et superficielle des éléments préfabriqués.

Si les architectes revendiquent le changement, la réception de l'architecture est irrémédiablement réduite à l'idée d'un emballage dans un langage incompréhensible. Ses constituants sont obscurs, hyper-élaborés, de provenance inconnue. Elle suit des normes de sécurité, d'ergonomie, d'accessibilité, de thermique, tellement complexes que seuls des ordinateurs peuvent les modéliser, tellement nombreuses qu'elles se recoupent et finissent par se contredire. Cette dérive dans le jargon et la normalisation à outrance peut être considérée comme l'ultime système de défense de la société industrielle face à la société d'information. Toutefois, l'apparition d'un "style écologique" marque l'ampleur du changement. La superficialité de l'architecture-langage, quand elle affirme un fond écologique, amplifie le contraste : si la communication continue d'affirmer une avancée artistique et écologique (face aux conventions industrielles consuméristes), toute la réalité matérielle affirme le contraire. Seule une architecture intelligible peut obtenir une légitimité.

NOTES :
* L'absorption de l'écologie par les puissances industrielles et politiques conduit aux pires paradoxe quand les groupes et pays les plus pollueurs se réunissent afin de décider des mesures écologiques à prendre : une absurdité qui apparaîtrait évidente si l'on réunissait de la même manière tous les plus grands du monde truands pour rédiger les textes fondateurs de la justice internationale.

Après la singularité / une architecture contre les normes

EliPi, ELisabeth Chauvin et Piere Gencey - construction

Dans le brouillard des idées troubles qui recouvre aujourd'hui les champs culturels, il n'est plus possible de faire confiance à un individu sous prétexte qu'une institution le présente comme expert, alors même que chacun peut prétendre avoir accès à tous les savoirs en fouillant les milliers de livres édités sur le moindre sujet, les dizaines de revues disponibles chaque semaine en kiosques, les innombrables vidéos accessibles en streaming, les millions de pages web traduites automatiquement en provenance de toute la planète. La culture fuit le cadre maîtrisé des écoles, des institutions, des grands médias ou des musées. Ce dérèglement, provoqué par un accès aux informations sans limite et sans hiérarchie, créé une sensation de perdition qui touche tous les domaines jusqu'à la sphère intime : politique, religion, médecine, alimentation, art. La maîtrise des récits contemporains échappe désormais à tout contrôle, de même que le passé n'appartient plus aux historiens officiels.

Les métiers et les savoir-faire se comptent également parmi les victimes de cette "société d'information" qui a étendu aux connaissances le principe d'horizontalité et d'abondance, autrefois revendiqué par la "société de consommation". Il devient difficile d'accepter l'ordre et l'organisation du moindre système dans le flou de la profusion des connaissances. Les professions se dissolvent. Les limites de toutes les corporations s'effacent. La moindre tradition culturelle, le moindre produit industriel, voit disparaître ses contours et apparaître les limites de son injustifiable existence. Pour s'en défendre, les grands systèmes tentent de produire des volumes d'information qui les dépassent, cherchant de cette manière à compenser l'inégalité face à la globalisation, multipliant les actes d'autorité, complexifiant les jargons.

Suivant la fable de la grenouille qui veut se faire plus grosse que le boeuf, dans une alliance inconsciente et inavouée, les grandes entreprises et les états s'entendent pour complexifier les productions et les normes afin d'assimiler l'information globale. Aujourd'hui, la technique et la norme sont si inatteignables qu'elles ne sont même plus compréhensibles par les commanditaires. Personne, ni individu, ni collectivité, ne peut en comprendre les contenus, les enjeux, les conséquences. Ce floutage apparaît au mieux comme ridicule mais il provoque le plus souvent la contestation, voire la paranoïa complotisme. Mais il est possible de contrer en signalant que l'incompréhension de notre monde n'est pas chose neuve, c'est une condition métaphysique. La nouveauté, c'est que la société d'information nous montre distinctement qu'aucun système ne peut nous guider.

L'adage socratique, celui qu'épouse Montaigne, " ἕν οἶδα ὅτι οὐδὲν οἶδα", je sais que je ne sais rien - c'est la condition de chacun post-singularité. Alors le déni apparaît dans la séduction des extrêmes : la contestation, la paranoïa du complotisme.

La capacité à rassembler les égoïsme : ce sont des recettes simples.

Des règles faciles à transmettre, qui se diffuseront avec aisance, tout à l'inverse des normes et des produits complexes que cherchent à diffuser les institutions, les entreprises, les "grands chefs" des restaurants étoilés, dans une opacité techniques et un jargon qui ne permet plus d'accéder ou de comprendre.


lundi 28 décembre 2015

Recette : dattes fourrées

Ingrédients pour 20 dattes Medjool personnes (cf Marmitton)

  • 300 g de dattes Medjool (pas trop tendres)
  • 250 g d'amandes décortiquées ou poudre de qualité
  • 150 g de sucre glace + 1 cuillère sirop glucose
  • 4 cuillères à soupe d'eau de rose
  • nappage translucide : 1/2 litre de sirop de sucre avec :
  • 1/2 citron
  • 1/4 l. d'eau
  • 150 g. sucre
  • 50 g. glucose
  • 10 g. gélatine (4 feuilles)
  1. Préparation de la recette : Préparer le sirop de sucre à l'avance et le laisser de coté. 
  2. Monder les amandes, les éponger, les râper, les passer au tamis et les mettre dans un bol. 
  3. Ajouter le sucre fin et l'eau de rose, bien malaxer pour avoir une pâte homogène. 
  4. Fendre les dattes sur un coté, éliminer le noyau et le remplacer par deux fois son volume de la farce de pâte d'amandes. 
  5. Plonger ensuite les dattes farcies dans le sirop, les égoutter sur un linge absorbant, après les avoir enrobées de sucre glace. 
  6. Laisser sécher 1 heure et les placer dans un plat tunisien typique (si possible).

samedi 26 décembre 2015

La fin des idéologies

Suite de : Des idéaux à la place des héros

La grande erreur de la fin du 20ème siècle consistait à croire que la Libération marquait une rupture avec la fin des totalitarismes en Occident. Chacun a désormais compris que le modèle de la "démocratie libérale" contenait toujours, en arrière-plan, une violence économique, provoquant des millions de victimes par le jeu simple et anonyme des flux de capitaux (qui restent des armes abstraites, plus distantes encore que les bombardements aériens). Cette violence économique est connue, elle accompagne les Grande Dépressions, celles des années 1880 et 1930. Mais ces flux d'argent sont admis comme des vérités rationnelles alors que les flux idéologiques semblent sous la responsabilité des hommes.

Le mot, "totalitarisme", destiné à grouper nazisme et communisme, est sans doute la première tentative pour montrer qu'un paradigme peut dépasser les êtres humains et les idéaux qu'ils revendiquent. Par leurs actions, Hitler et Staline apparaissent mués par une mécanique mentale identique et ils aboutissent aux mêmes horreurs. Mais le mot d'Arendt n'est pas adapté à une réalité plus large incluant la culpabilité du "capitalisme" dont l'aveuglement administratif (au sens le plus large, incluant les entreprises privées) contient également cette logique aveugle qui provoque le massacre. Cette inadéquation pousse les historiens au déni. Jusqu'à ces dernières années, personne ne voulait apparenter la "guerre totale" déclarée par Goebels avec les bombardements stratégiques des Alliés. Aujourd'hui, la chose semble évidente. Il faudrait pousser plus loin.

S'il faut reprendre le fil de cette histoire en effaçant les héros pour les remplacer par des ères, à la manière des strates géologiques, avec sa faune fossile, son environnement reconstitué, ses déplacements tectoniques, il faut trouver un mot pour désigner ce paradigme commun au Communisme, au Nazisme et au Capitalisme.

Le 19ème siècle, encore proche de l'ère des croyances, pourrait être nommé "L'ère idéologique". L'idéologie du partage va fluer à travers les continents, impulser la révolution française puis les peurs des complots et des massacres, provoquer la guerre de Sécession ; peut-être son bouquet final réside-t-il dans la révolution russe ? Règne au même instant une idéologie d'abondance, qui se promène dans l'industrie et entretient des relations contradictoire avec le partage.

Bien évidemment, le 20ème siècle n'est plus celui des idéologie, il serait plutôt une période de rationalisme, où l'être humain s'abandonne à une loi qu'il croit être mathématique. rationalisme industriel, rationalisme racial, rationalisme social, rationalisme économique... Mais ce n'est pas rendre service à l'intelligence de réduire le rationalisme à cette expression perverse, torturée dans le but de servir quelques individus, ceux qui revendiquent la loi et la raison dans leurs seuls intérêts.

Ce serait plutôt un "prétextisme" mais le mot n'existe pas ; enfin, si, il y a celui de perversion.

jeudi 24 décembre 2015

Des idéaux à la place des héros

La mort des religions ne provoque pas ce vide désopilant que l'on attribue trop souvent à Nietzsche mais elle est plus ancienne et fait naître un bambin bien plus joyeux : l'utopie. La fin des religions, marque aussi l'apparition du libre arbitre, la conscience d'être un homme libre dans sa condition naturelle. L'humain devient, à ses propre yeux, un être social possesseur de lui-même, et se doit de trouver une règle comme substitut aux lois divines. Cette découverte marque pleinement le principe de modernité par la liberté qu'elle induit; elle n'est pas celle d'un homme ou d'un temps, mais traverse les époque et se trouve revendiquée par une foule d'individus, de Bacon à Descartes, des Révolutionnaires aux Communards, des Communistes aux Nazis, jusqu'aux néoconservateur et aux écologistes. Cette modernité est ancienne et clivante.

L'utopie moderne est finalement déjà présente en Europe dans la période de traduction du XIIème siècle, mais il reste possible d'affirmer qu'elle préexiste dans la Grèce antique, qu'elle inspire Rome. Certains la sorte même de l'Occident pour la redécouvrir aux côtés du bouddhisme, ou d'autres religions plus lointaines que l'on regroupe sous les termes de chamanisme et d'animisme. Pensée, croyance, paradigme, cette pulsion utopique n'est pas non plus l'apanage des élites ; aujourd'hui, chaque électeur a conscience d'y adhérer en votant pour un monde meilleur. Parfois désopilé, il désire malgré tout participer à une construction merveilleuse, poussé par le désir de créer un modèle qui lui correspond, ou excédé par la haine de son impossible expression.

Mais ces modèles ne sont pas aisément accessibles à la description, ils collent à l'ère du temps et sont globaux, depuis que l'ère moderne a été ainsi nommée par les historiens occidentaux. Ni les individus, ni les puissantes élites politiques ne peuvent changer ces paradigmes. Cette modernité et cette volonté de rendre le monde meilleur est profondément ancré dans les individus, chez la plupart des enfants, à moins qu'il ne soient gagnés par le cynisme (en étant plongé dans une violence dont les parents sont censés les protéger).

Il faudrait cesser d'écrire l'histoire comme une épopée pour comprendre et complexifier ces paradigmes réformateurs. Les gentils et les méchants, les occupant et les libérés, les vainqueurs et les vaincus ne sont que des illusions qui voilent la réalité des flux d'imaginaires qui gagnent tous les esprit et toutes les batailles. L'analyse historique devrait s'attacher à remplacer les héros par des idéaux, afin de comprendre que les individus ne sont que les marqueurs d'idéologies qui parcourent des temps plus longs, qu'ils ne sont que le cristal qui se forme autour d'une impureté dans une solution aqueuse où tout est bien dilué. Le héros est, par définition, une exception. Il ne devrait pas intéresser les historiens sérieux.

mercredi 23 décembre 2015

Recette : orangettes

atelier des chefs

  • 2 grosses ou 3 moyennes oranges (de table)
  • 700 g sucre
  • matériel : grille de four et journal pour séchage
  • 250 g chocolat noir
  1. Réaliser les sirops : dans une casserole, porter à ébullition 20 cl d'eau et 200 g de sucre, puis laisser refroidir. Dans une autre casserole, porter à ébullition 10 cl d'eau et 500 g de sucre afin de réaliser le sucre candi, puis laisser refroidir.
  2. Éplucher les oranges au couteau en laissant la chair blanche sur la peau. Couper de fins bâtonnets de peau, puis les mettre dans une casserole d'eau froide et porter à ébullition. Les égoutter puis les remettre dans la casserole. Remettre de l'eau froide et porter de nouveau à ébullition. Répéter l'opération une 3e fois pour faire disparaître l'amertume de l'orange.
  3. Mettre les bâtonnets d'orange dans le premier sirop et faire frémir pendant  30mn (tendre), puis les déposer dans le deuxième sirop et laisser frémir 10 min. 
  4. Retirer et déposer sur un grill de four, puis les positionner sur le dos (écorce) au-dessus d'un journal (pour éviter le dépôt de gouttes de sucre partout), laisser reposer une nuit.
  5. Faire fondre 1/3 du chocolat au bain-marie (30-31°c), puis le verser sur les 2/3 restants. Mélanger l'ensemble pour tout faire fondre, puis tremper à moitié les orangettes dedans. Les poser ensuite sur un papier sulfurisé, puis laisser prendre au réfrigérateur 10 min.
  6. ATTENTION : conserver le sirop pour la recette friandise // pain d'épice

Recette : pour 12 Florentins

Pour 12 grandes pièces environ (marmiton transformé) :

  • 75 g de beurre salé
  • 75 g de sirop de sucre (maison à 25cl eau , 10 g miel, 40 g sucre)
  • 40 g de farine fluide
  • 75 g d'amandes effilées
  • 25 g d'abricots secs hachés
  • 75 g de fruits confits (au choix) coupés en très petits cubes
  • 100 g de chocolat noir fondu
  1. Préchauffer le four, thermostat 4 (180°C), et préparer 2 plaques couvertes de papier sulfurisé. 
  2. Chauffer le sirop de sucre avec le beurre jusqu'à ce que celui-ci soit fondu (certains conseillent de laisser bouillir une dizaine de minute pour entamer la caramélisation). 
  3. A petit feu, en tournant, d'abord saupoudrer la farine, puis verser les abricots secs, puis les fruits confits et les amandes. Homogénéiser.
  4. À l'aide de deux cuillères à café, former des petits tas de pâte bien espacés sur les plaques. sur chaque plaque : deux fois six disques peu épais de 5 cm de diamètres (ils passent à 8 cm après cuisson, prévoir autant de vides que de pleins entre chaque tas de pâte). Aplatir à la fourchette humide (tremper dans un verre entre chaque remodelage).
  5. Enfourner 10 minutes. Laisser refroidir 1 minute sur la plaque, puis sur une grille. Badigeonner alors le verso des florentins avec le chocolat fondu.

Recette : Loukoums



La vraie recette, pas la version haram avec de la gélatine de porc...
  • 500 g. de sucre
  • jus 1/4 citron 
  • 1 c. à s. de crème de tartre
  • 80 g. de Maïzena
  • 1 mini pointe de couteau de colorant rouge en poudre
  • 2 c. à soupe : soit rose (eau de rose), soit vert (fleur d'oranger)
  • "fariner" avec 3/4 verre de sucre glace + 1/4 verre de maïzena

  1. Dans une casserole mélangez sucre + 10 cl d'eau + citron. Amenez à ébullition à 115/120°C,  jusqu'à ce que le sucre ait du mal à revenir au centre en touillant et commence  à jaunir.  
  2. Cuissons 1 & 5 = obtenir le bruit de "confiture qui prend" (rissole au passage de la cuillère).
  3. Dans une autre casserole mélanger maïzena + crème de tartre + 15 cl d'eau réchauffer doucement sans l'épaissir, éviter les grumeaux en fouettant - obtenir mélange fluide et tiède, mais pas épaisse (le faux conseil de l'épaissir avant de verser ne marche pas)...
  4. Versez petit à petit cette maïzena chaude dans le sirop et fouetter vigoureusement 
  5. laissez cuire à feu doux (5) 10 mn + moyen (6) 10 mn + fort (7) 10mn pour éviter les débordements et remonter progressivement à 110/115°c. Remuez en permanence avec une cuillère en bois à bout droit pour avoir un mélange de couleur jaune pâle. 
  6. Ajoutez l'eau de rose, suivant le goût et une mini-pointe de couteau de colorant rouge pour avoir un rose pâle. Si vous voulez, vous pouvez ajouter les amandes. recuire quelques minutes.
  7. Soupoudrer  d'une bonne dose de maïzena au fond d'un moule à gâteau carré de 20 cm 
  8. Verser au fond, laissez refroidir 15 mn, soupoudrer de maïzena au dessus pour lisser (le conseil de l'huile ne marche pas)
  9. Laissez reposer au frais pendant 12 heures 
  10. Couper avec un couteau huilé (4 x 4) et trempez  dans le mélange sucre glace et maïzena.
  11. Conserver dans une boite hermétique avec le reste du sucre entre les couches

samedi 5 décembre 2015

Frontière et progrès

« Mais où va la France ? » : ce n'est pas un nonagénaire qui s'exprime ainsi, mais un tout jeune homme que j'ai surpris en sortant d'une supérette, une semaine après les derniers attentats. En entendant ça, on aurait dit à pépé d'arrêter de radoter, mais là, que puis-je répliquer ? J'en reste bouche bée. Avec les drapeaux et la devise nationale qui se remettent à flotter dans l'air, on finit par s'habituer à ces idées d'autrefois, celles qui resurgissent dans l'ambiance nauséabonde de nos grandes villes. L'une d'elle consiste à revendiquer le retour "à la normale" comme un impératif majeur : ne pas céder aux terrorisme, c'est continuer à vivre normalement ! Ça tombe bien, on ne voit pas trop ce que l'on pourrait changer, tellement nous sommes prisonniers de notre train-train quotidien.

Mêlant l'intérêt pratique à la revendication idéologique, tout en sentant les fêtes de fin d'année s'approcher dangereusement, quelques boutiquiers ont poussé cette normalité militante jusqu'à l'extrême en présentant shopping et Saturday night comme des actes de résistances. Peut-être ce jeune homme excédé était-il un résistant camouflé qui n'avait pas trouvé le bon produit en rayon ? Quel désastre, aujourd'hui, quand celui qui ose encore faire ses courses n'obtient pas satisfaction. Rentré à la maison, c'est tout le maquis qui se retrouve dénudé, sans béret ni fusil.

« Mais où va la France ? » Il faut le dire, les notions de progrès et de frontières sont bien loin derrière. Se poser cette question, c'est se replacer dans la condition d'une très vielle modernité. Car le progrès est mort en 1973, après les chocs pétroliers. La France est morte en 1992, après la ratification du Traité de Maastricht. Et ce ne sont que des dates pour mémoire car ces disparitions sont plus anciennes, ancrés dans les ruines des deux guerres mondiales. Qu'est-ce que La France, quoi qu'il en soit ? C'est un mythe de la Révolution réinventé au XIXème siècle, exactement comme le progrès. Des mythes nécessaire pour avancer dans le vide sans y penser. La question du jeune homme est celle d'un individu du XXIème siècle. Il a oublié le XXème et cherche les mythologies du siècle précédent.