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sardinerie Ampart à Bou Haroun - via http://hubertzakine.blogspot.com |
(écriture en cours)
Thimothée fils arrive en Afrique du nord sur une terre chaude, conquise depuis longtemps, où les enfants des colons français, des travailleurs issus d'autres pays européens et des "indigènes" se rencontrent, se comprennent, et commencent à s'hybrider, bien qu'ils se rattachent à différentes traditions et religions. Mais le décès de Thimothée fils, en 1939, marque la fin de cette situation provisoirement stable, et le début de relations plus difficiles inscrites dans la Grande Histoire autour des deux "événements" qui touchent indirectement puis de plein fouet les "départements français d'Algérie" : l'Occupation de la métropole (1940-1945) puis la décolonisation (1955-1962).
Les supports-médias qui auraient le mieux permis de se figurer le quotidien de ces jeunes aurait dû être la radio puis la télévision qui couvrent les vingts dernières années de l'occupation de l'Algérie par la France. Mais, contrairement à la peinture, aux débuts de la photographie, aux cartes postales ou aux articles de la presse locale, qui pénètrent dans les moindres détails le XIXe siècle et le début du XXe siècle, les contenus diffusés par les ondes s'avèrent limités. L'iconologie peut y percevoir une révolution, mais ces nouveaux médias peinent à compenser la raréfaction de leurs prédécesseurs. L'échelle des représentations n'est plus la même. Ce sont des médias flous. D'autre part, bien que la photographie soit devenue pleinement démocratique, elle se pratique en famille et les "albums" restent encore prisonniers d'archives privées : il ne s'agit plus d'une médiation ouverte.
Par chance, la génération nommée "silencieuse" aux Etats-Unis et leurs enfants baby-boomers ont été les premiers a utiliser les réseaux numériques, offrant de nombreux souvenirs déposés dans différents sites mémoriels : quelques individus décrivent l'histoire des villages de colons en Algérie... D'autre part, quelques cartes postales tardives (dites "semi-modernes") ont été éditées. Trop rares pour se trouver en permanence sur des sites de vente en ligne, un certain nombre ont été numérisées, puis publiées en ligne, et permettent de découvrir les sites où ces gens ont vécu, même si ces images sont légendées sans autre certitude par des historiens amateurs. Il semble que cette petite histoire appartienne aux "vaincus" et qu'il manque un méta-récit, longtemps aux mains "vainqueurs" algériens, plus soucieux de leur histoire propre que de la vie des colons - suivant une attitude compréhensible.
Les supports-médias qui auraient le mieux permis de se figurer le quotidien de ces jeunes aurait dû être la radio puis la télévision qui couvrent les vingts dernières années de l'occupation de l'Algérie par la France. Mais, contrairement à la peinture, aux débuts de la photographie, aux cartes postales ou aux articles de la presse locale, qui pénètrent dans les moindres détails le XIXe siècle et le début du XXe siècle, les contenus diffusés par les ondes s'avèrent limités. L'iconologie peut y percevoir une révolution, mais ces nouveaux médias peinent à compenser la raréfaction de leurs prédécesseurs. L'échelle des représentations n'est plus la même. Ce sont des médias flous. D'autre part, bien que la photographie soit devenue pleinement démocratique, elle se pratique en famille et les "albums" restent encore prisonniers d'archives privées : il ne s'agit plus d'une médiation ouverte.
Par chance, la génération nommée "silencieuse" aux Etats-Unis et leurs enfants baby-boomers ont été les premiers a utiliser les réseaux numériques, offrant de nombreux souvenirs déposés dans différents sites mémoriels : quelques individus décrivent l'histoire des villages de colons en Algérie... D'autre part, quelques cartes postales tardives (dites "semi-modernes") ont été éditées. Trop rares pour se trouver en permanence sur des sites de vente en ligne, un certain nombre ont été numérisées, puis publiées en ligne, et permettent de découvrir les sites où ces gens ont vécu, même si ces images sont légendées sans autre certitude par des historiens amateurs. Il semble que cette petite histoire appartienne aux "vaincus" et qu'il manque un méta-récit, longtemps aux mains "vainqueurs" algériens, plus soucieux de leur histoire propre que de la vie des colons - suivant une attitude compréhensible.
La sardinerie de Bou-Haroun est alors une entreprise familiale, discrètement dirigée par Yves et Emile Ampart ; "discrètement", car le nom d'Ampart apparaît plus rarement dans la presse algéroise, occupée par des faits d'actualité plus dramatiques. Les naissances n'y sont plus annoncées, seuls les décès figurent encore dans la rubrique nécrologique. Deux nouvelles générations surgissent pourtant durant cette longue période et représentent les "arrières-grands-parents" (nés avant-guerre) des enfants d'aujourd'hui. Ces nouvelles générations vivent leur années de jeunesse dans cette "ancienne colonie", de jeunes chanceux qui évitent les guerres mondiales, la crise de 1929, et profiteront à l'âge adulte d'une période d'expansion économique sans équivalent, mais ils seront cependant marqués, souvent traumatisés, voire tués, au moment d'une décolonisation qu'ils ne comprendront pas.
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Moment pivot des "événements d'Algérie", des grands-parents de la génération actuelle (Z - digital native) sont de jeunes adultes qui vont ancrer leurs souvenirs dans les nouveaux médias. |
Génération silencieuse ou génération pivot ?
La multiplication des descendants ne rend plus possible l'approche individu par indivu, il faut désormais se représenter les situations en fonction des générations. Les parents de Thimothée Ampart, sa famille nourricière, ses pères et mères inconnus, sont des adultes nés dans la transition des XVIIIe-XIXe siècle et se positionnent comme "génération zéro". Ils vivent dans un moment temporel flou où se place également Louis-François Pinagot (1798-1876), le célèbre inconnu révélé par Alain Corbin. Il faut, pour réinventer leurs vies, des trésors d'érudition car ces gens sont précisément inscrits dans une période où l'histoire sociale peut tout juste débuter, recouvrant à la fois le point chronologique le plus éloigné mettant à disposition les principaux documents-sources, et l'instant où se cristallise l'administration après la Révolution. C'est aussi à cette époque que se fixe l'orthographe, y compris celle des noms de famille.
La "première génération",représentée par Thimothée père, adhère encore partiellement à une époque faite de "grandes conquêtes", à la fois culturelles et géographiques. L'Occident achève la découverte d'un monde qu'il compte exploiter, s'appuyant sur des colons, pionniers et autres explorateurs qui cartographient les ultimes recoins de la planète. L'arrivée sur Audierne de Thimothée père peut s'interpréter comme l'une de ces conquêtes, lorsqu'il s'éloigne de la stabilité de sa vie passée pour s'installer dans un port mal aménagé, sur une lande déserte à peine lotie. Les nombreuses pertes humaines dans les naufrages - incluant la sienne en 1894 - adhère encore à ce moment historique.
La "première génération",représentée par Thimothée père, adhère encore partiellement à une époque faite de "grandes conquêtes", à la fois culturelles et géographiques. L'Occident achève la découverte d'un monde qu'il compte exploiter, s'appuyant sur des colons, pionniers et autres explorateurs qui cartographient les ultimes recoins de la planète. L'arrivée sur Audierne de Thimothée père peut s'interpréter comme l'une de ces conquêtes, lorsqu'il s'éloigne de la stabilité de sa vie passée pour s'installer dans un port mal aménagé, sur une lande déserte à peine lotie. Les nombreuses pertes humaines dans les naufrages - incluant la sienne en 1894 - adhère encore à ce moment historique.
Thimothée fils appartient quant à lui à une "deuxième génération", moins dangereusement conquérante, évoluant dans un "monde fini, un monde couvert" (Palsky). À la fin du XIXe siècle, l'espace semblait déjà clos. Le temps lui-même avait commencé à se borner de part et d'autre, dans la linéarité de l'évolution naturelle. En 1880, Camille Flammarion décrit ainsi le début et la fin de l'univers dans son Astronomie populaire, et achève le chapitre consacré à la Terre par la mort annoncée de la "dernière famille" (gallica.bnf.fr,p.101). L'illustrateur représente la scène sous forme de squelettes agglutinés, réunissant un homme, une femme, un enfant réfugiés dans une grotte glacée, gardée par un chien, lui aussi réduit à un tas d'ossements ! Les vanités dépassent l'individu, atteignent l'échelle de la famille, des civilisations, de l'humanité tout entière condamnée à disparaître ! La doctrine du moment voulait que la planète vieillisse en se refroidissant et en se contractant : d'après les savants, les montagnes surgissaient comme ces reliefs que l'on observe sur sur la peau d'une "pomme fripée".
Cette comparaison organique semblait évidente avant le surgissement de nouvelles théories, comme la relativité ou la tectonique des plaques, bien que personne ne les connaisse en dehors d'un cercle d'initiés. Il est évident que les enfants de Thimothée fils, même s'ils ont tous été scolarisés, ignorent probablement toute leur vie ces objets intellectuels complexes qui bouleversent la représentation scientifique de notre univers. En 1922, Einstein attire une foule au Collège de France, mais reste compris de rares physiciens (openedition.org). En 1922, Wegener étant allemand, les savants français entendent ses propos uniquement par la médiation d'un géologue suisse (annales.org), mais il faut attendre les années 1960 pour qu'elles fassent l'unanimité... Pourtant, l''une et l'autre de ces "théories" confirment l'entrée dans une époque moins stable qui va accompagner et suivre la Première Guerre mondiale. La "dernière famille", immuable, est bien morte à ce moment précis, car le monde va basculer. Les continents se déplacent. La terre ne refroidit plus, elle entre en ébullition...
La IV génération forme donc un parfait pivot : elle est constitué d'individus parfois encore vivants, les "arrières-grands-parents", qui ont été les premiers à laisser des témoignages sur le Web. Elle est aussi la dernière qu'il est possible de tracer suivant les méthodes traditionnelles de la généalogie. Enfin, dans le cas des colons en Algérie, c'est cette précisément cette génération qui vécut à l'âge adulte l'exode et le retour en France.
Récits sur Bou-Haroun dans le Web-1.0/2.0
Les sources se multiplient, et sont si nombreuses qu'il faut les classer par ordre d'apparition. l'accumulation des données rend souvent difficile la possibilité de démêler les différentes sources. Le premier site évoquant Bou-Haroun semble dater de 2005, créé par un Algérien faisant une expédition touristique et historique de la région (tipaza.typepad.fr) :
« En continuant notre promenade et en quittant Berard Tagouraît vers Alger nous rencontrons le village de Bou Haroun toujours sur la côte à quelques km [...]. Le port de Bou Haroun, était anciennement un abri de pêche. Il a été érigé par une colonie de Siciliens venus en Algérie dès la prise d’Alger par les Français. Les îliens de l’Adriatique originaires d’un village Cefalû n’ont pas trouvé mieux que de débaptiser le bourg de Tefechoun, "Tchifalo" et d’avancer deux kilomètres plus loin pour édifier ce qui est aujourd’hui le port de Bou Haroun. Voilà pour la petite histoire. . . . Pour moi qui ai connu ce charmant village cela reste un mélange d’odeurs: de sardines ou d’anchois. L’endroit était poissonneux... mais il ne faut pas le crier bien fort. :) »
Ce petit message déclenche immédiatement une centaine de commentaires, des habitants actuels, des anciens, restés sur place ou exilés, né de familles ayant des noms aux consonances algériennes, italiennes, espagnoles, et plus rarement française. L'un des messages les plus récents :
Ces messages sous forme de "bouteilles à la mer" se multiplient à l'infini. Un autre site (http://alger-roi.fr) dépose le 29 septembre 2007 un texte d'Edgar Scotti et Joseph Palomba, historiens amateurs spécialistes de l'histoire de la pêche. Les auteurs détaillent la pratique de la pèche à la sardine, autour d'Alger, et décrivent brièvement l'existence à Bou-Haroun avec ses deux industries : la "coopérative de sardinerie" et la conserverie "Yves Ampart".
« Née à Bou-Haroun en 1943 je m appelle Danielle Becker, fille d'une Bou-Harounienne egalemnt appelée Hanifa (pron R'nifa) qui fuut élevée par la famille Marioutche Di-Crescenzo l'épicière de la rue descendant vers le port, pres de l'usine Ampart pour situer. Pendant mes vacances je travaillais dans la guinguette "La Mouette" sur la plage, la guinguette appartenait de Seraphine et à Armand Piris que tout le monde connaissait car il avait fait un cinema au village. Je recherche les parents de ma mère. Son père etait Ali Ben-Ahmed pécheur à Chercjell et sa mère Fatima Hassani. Grands-parents jamais connus. Si qq 'un sait qquelque chose à leur propos SVP en urgence envoyer-moi un mail [...] Danielle intissar Becker | 15/07/2012 à 09:45 »
Ces messages sous forme de "bouteilles à la mer" se multiplient à l'infini. Un autre site (http://alger-roi.fr) dépose le 29 septembre 2007 un texte d'Edgar Scotti et Joseph Palomba, historiens amateurs spécialistes de l'histoire de la pêche. Les auteurs détaillent la pratique de la pèche à la sardine, autour d'Alger, et décrivent brièvement l'existence à Bou-Haroun avec ses deux industries : la "coopérative de sardinerie" et la conserverie "Yves Ampart".
« Même si on en pêchait toute l'année, la sardine arrivait à maturité dès le mois de mai et les prises étaient abondantes jusqu'à la fin octobre. Manne frétillante, elle exhalait dans les casiers, tous les effluves de la mer. Elle prenait aussitôt le chemin des marchés et des friteries où des centaines de femmes et de jeunes filles à l'appel de la sirène, comme à BouHaroun et à Chiffalo se précipitaient pour vider et étêter ce poisson. Issues de familles de pêcheurs, les ouvrières chrétiennes ou musuhnanes, participaient au conditionnement de ce produit de nos côtes très recherché aussi par le conunerce de l'alimentation et par l'intendance militaire... pour les trouffions qui en étaient si friands.
[...] Une importante main-d'oeuvre féminine était en effet nécessaire pour traiter dans les meilleurs délais, sardines et anchois dès l'arrivée des lamparos. Le mélange des odeurs de poissons frais et d'huile frite caractérisait l'approche de la coopérative sardinière de Bou-Haroun, dont le directeur réunissait tous les ans l'ensemble des membres du personnel avec leurs enfants. Une main d'oeuvre nombreuse et qualifiée était en effet nécessaire pour traiter et conditionner le poisson dès la mise à terre de la pêche journalière. Ce qui explique la dissémination de ces ateliers dans tous les ports qui abritaient des lamparos ou des palangriers. Intéressés par l'offre d'un produit de première fraîcheur et de belle qualité, des industriels se sont installés sur toute la côte. Dans des usines de taille moyenne, ils ont mis au point des procédés, toujours utilisés, de friterie des sardines et de sertissage des boites métalliques. Même incomplète. la liste de ces conserveurs éclaire de façon significative leur souci de se rapprocher des points de débarquement des sardines, sardinelles et anchois ainsi que d'une main d'oeuvre familiarisée avec les activités maritimes. »
Egalement daté de 2007, par la suite repris dans de très nombreux blogs, une page HTML est déposée sur e-monsite.com et donne pour la première fois une description assez complète du village, dans le contexte particulier de la colonisation (http://bou-haroun.e-monsite.com/) :
« Le golf de Bouharoun, ouvert vers le nord, le mouillage n’étant pas profond, contraignait depuis toujours les pêcheurs à pousser chaque matin leurs bateaux avant de prendre la mer. Le soir, ils les tiraient à terre pour les mettre hors d'atteinte des grosses vagues déferlantes. En 1830, il n'y avait sur ce site dénommé " Haouch ez Zaouia " que des palmiers nains et des fourrés de câpriers. Les lieux étaient inhabités. Bouharoun n'existait pas. La présence de nombreuses koubas dont celle du vénéré " Bouharoun " située dans un ravin, est probablement à l'origine du nom du village.
D'abord simple hameau de Tefeschoun, le village est situé entre ce ravin et celui de Sidi-Bel-Hassine, plus connu sous le nom de " Ravin des voleurs ". A cette époque, l'Algérie se trouvait au confluent de plusieurs courants migratoires. Dès le 6 juin 1831, Ferrer Jéronomo, originaire de Calpé [Espagne] arrive à Bouharoun. Un membre de la famille Rotolo aurait été le premier à tirer son bateau sur la plage de Bouharoun. Il y sera suivi par beaucoup d'autres. Les hommes viennent seuls. Ils s'abritent à côté de leur bateau, dans de pauvres cabanes de roseaux ou de planches, parfois dans des grottes. La sécurité s’améliorant, les femmes ne tardent pas à les rejoindre, contribuant à l'amélioration de leur confort ménager. De nombreuses familles originaires d'Espagne continentale et des îles Baléares, notamment de l'île de Minorque éprouvée par une sévère crise économique, arrivent sur la côte, viennent ensuite les italiens, originaires de la région de Naples et des îles de Procida et d'Ischia dont l'économie était complètement ruinée par le séisme de 1883.
Un peu plus bas sur la plage, le hameau maritime abritait soixante dix-huit familles ayant de nombreux enfants et de vieux parents, installées de façon précaire sur la plage, beaucoup sont pauvres mais cette pauvreté n'engendre pas la misère, ces hommes habitués aux caprices de la Méditerranée, à ses redoutables grains accompagnés de grosses pluies orageuses, résistaient aux difficiles conditions de vie et de travail sur leurs palangriers. La plupart de ces pêcheurs, originaires d'Espagne et d'Italie, ont opté pour la nationalité française. Avec l’autorisation de Guillaume Prats, un riche monsieur, ces nouveaux habitants commençaient à construire, au début du 20ème siècle sur la falaise et sur la propriété de Prats, connues, à l’époque, sous le nom de la Fermette, judicieusement qualifiée par Maurice Pons, écrivain français, de noyau historique de Bouharoun. Ils sont alimentés par un puit, dont l'eau est saumâtre dès que les vagues déferlent sur la plage. Le débit de la source coulant sur la propriété de Prats étant très abondant, il autorise donc la construction d’une conduite installée sur sa propriété pour alimenter le village.
En 1903, la pénurie de sardines sur les côtes bretonnes incite les deux frères Thimothée et Jean-Guillaume Ampart à se fixer à Bouharoun après avoir apprécié les qualités des marins-pêcheurs d'origine espagnole et italienne. Les Ampart, connaissant bien leur métier de conserveur et maîtrisant parfaitement les techniques de préparation et d'emboîtage, ouvrèrent en 1909 leur première usine. Les pêcheurs n'avaient toujours pas de port. Ils devaient dès trois ou quatre heures du matin pousser leurs palangriers à la mer et le soir les tirer à terre en rentrant dans l'eau glacée jusqu'à la poitrine. Pour le Préfet d'Alger, Ces hommes sont à l'origine d'une ressource et d'une industrie de conserveurs salaisonniers. C'est donc au plus vite qu'il faut les fixer en leur faisant engager leurs capitaux dans la colonie. En conséquence, trente-huit familles de pêcheurs ayant pris la nationalité française sont installées sur douze hectares expropriés sur les bonnes terres agricoles de M. Chabert-Moreau. Leurs " bateaux boeufs " ou à voile qui traînaient le filet sont remplacés par des chalutiers à moteur. Enfin, même si depuis 1940, les cabestans sont équipés d'un moteur à explosion, les pêcheurs n'utilisaient que de légères embarcations susceptibles d'être halées le soir sur la plage et poussées le matin à la mer.
Alors qu'il n'y avait en 1830, aucun pêcheur algérien sur ce littoral, en 1900 Echaîb Mohamed était le premier à s'intéresser à cette activité à Bouharoun et environs. Il sera suivi par beaucoup d'autres patrons pêcheurs, parmis eux mon grand père et mes oncles. Ils acquièrent palangriers et lamparos, baptisés aux noms de leurs enfants et sur lesquels ils s'empressaient de graver au feu, une main de fatma. A partir du moment où le village se construisait, ses habitants confrontés à tous les grands événements, acquièrent une identité et s'enracinent dans une entité humaine groupant Bouharoun, Tefeschoun et Chiffalo, autour d'un cimetière commun. Ils participent à la première guerre mondiale et s'enfoncent dans la crise économique qui suivit. Vint la seconde guerre mondiale, certains y laisseront leur vie. Ceux qui reviennent de ces meurtrières batailles, en ramènent des blessures et parfois aussi d'utiles notions de mécanique ou de soins aux malades qu'ils mettent au service de certains de leurs camarades qui ne savaient ni lire ni écrire. Pour ces laboureurs de la mer et de la terre, la solidarité n'est pas un vain mot.
Peintres, poètes ou simple visiteur apprécient le calme de Bouharoun. A partir de l'ébauche de jetée, ils mouillent leur ligne ou plantent leur chevalet afin de fixer sur une toile la majestueuse beauté du mont Chenoua ou le bleu du ciel ou de la mer. Les habitants des villages de l'intérieur fuyant la torpeur des étouffantes journées d'été, trouvaient à Bouharoun un peu de fraîcheur, un air propice à la santé de leurs enfants et l'accueil sympathique de sa population.
Le 5 juin 1962, de peur de devenir des étrangers dans le pays où ils sont nés, les pêcheurs de Bouharoun, après une périlleuse traversée de la Méditerranée se retrouvèrent dans les ports : du Roussillon, du Languedoc ou de la Provence. Ce village reste le symbole de la rencontre et de la coexistence paisible de plusieurs communautés dont les diverses origines et activités agricoles, maritimes ou industrielles n'ont jamais fait obstacle à leur fusion la plus totale. La preuve la plus tangible de cette entente qui régnait à Bouharoun entre les différentes familles issues de l'immigration espagnole, italienne ou bretonne est celle qui les unissait aux algériens autour de l'abri précaire de leur petit port. [...]
Moi qui ai grandis là-bas, Bouharoun reste pour moi un mélange subtil d’odeurs de sable chaud, de sardines ou d’anchois, de posidonies décomposées sur la plage, d’iode et de sel. Ces effluves me chatouillent les narines à chaque fois que je pense, que je parle ou que je regarde une photo de mon éternel petit patelin. »
Lamparos à Bou-Haroun |
Les sources bibliographiques
L'origine non-dite du texte est probabalement celui-ci :Huetz de Lemps Alain. Pêcheurs algériens. In: Cahiers d'outre-mer. N° 30 - 8e année, Avril-juin 1955. pp. 161-195. (persee.fr)
Lacoste nous a raconté la naissance des villages spontanés de Bon Haroun et de Chiffalo, à l'Ouest d'Alger [Lacoste. La colonisation maritime en Algérie, 1830-1930, 1931]. C'est en 1875 que des pêcheurs de Cefalu, d'Isola del Femine, de Palerme, s'installent à Bou Haroun où ils trouvent quelques Espagnols de Calpe et d'Altea réfugiés dans des grottes naturelles. La petite colonie prospéra, malgré des conditions de vie extrêmement dures : bloqués sur la plage même par les colons riverains, ils avaient installé de misérables gourbis, sans eau potable, sans éclairage, menacés par les tempêtes. De nouvelles familles construisirent des baraques en planches. Dès 1880, la popula¬ tion atteignait 150 personnes. En 1900, elle était de 350 habitants. Les pouvoirs publics s'occupèrent alors de cet établissement spontané et des expropriations de terrains en 1908 permirent la construction d'un véritable village, qui est devenu aujourd'hui très prospère.
Bou Haroun essaima à son tour. Vers 1886, une partie des Italiens du village, qui ne s'entendaient guère avec les Espagnols, allèrent s'installer sur une plage à 2 kilomètres plus à l'Est. Ils obtinrent l'autorisation de la commune de Tefeschoun d'occuper une petite bande de terrain, où ils construisirent des maisons de pierre et de terre. Ce hameau fut appelé «Cefalu », en souvenir de leur patrie d'origine, ce qui, francisé, a donné Chiffalo. La petite colonie prospéra aussi vite que celle de Bou Haroun : 120 habitants en 1896, 200 en 1900, 330 en 1905, 700 en 1929. Accroissement dû essentiellement à une intense natalité, les apports de l'extérieur étant restés très faibles jus¬ qu'à la première guerre mondiale.XXXXXXXXXXXXXXXXXX
L'origine des pêcheurs joue un rôle considérable dans la vie maritime algérienne. Elle marque d'abord le genre de vie, les habitudes sociales. Pendant longtemps, Italiens et Espagnols ont conservé une défiance, presque une hostilité les uns envers les autres. Les Espagnols, plus entreprenants, considéraient les Italiens comme des gens routiniers et superstitieux. Mais les Italiens méprisaient les Espagnols, qui «ne sont pas des marins », «préfèrent le bar à la mer » et veulent des engins à gros rendement «parce que c'est plus facile pour les médiocres ». Aujourd'hui ce chauvinisme s'atténue. Les mariages entre Italiens A Espagnols deviennent fréquents, même entre les Espagnols de Bou-Haroun et les Italiens de Ghiffalo ! Dans les ports de population mixte, les minorités perdent leur individualité : [...] partout les jeunes emploient de plus en plus une langue commune, le français." (p.174-175)
Dans l'Algérois, le contraste se retrouve entre les chalutiers espagnols de Bou Haroun et les lamparos italiens de Ghiffalo.(p.175)
L'ouvrage entre par la suite dans les plus infimes détails de l'évolution des techniques de pêche en s'appuyant sur ses trois origines principales : la Bretagne (Atlantique), l'Espagne et l'Italie. La convergence des techniques semble aboutir à une adaptation spécifique au territoire, même si les traditions des pays d'origine se perçoivent encore :
« Le sardinal est un filet utilisé depuis des millénaires en Méditerranée. Il est analogue aux filets employés pour la pêche de la sardine dans l'Atlantique : c'est une nappe rectangulaire à mailles fines (11 à 16 mm.) et chaque bateau doit posséder tout un jeu de filets à mailles différentes suivant la grosseur des poissons; la nappe est en effet immergée verticalement, grâce à des flotteurs de liège et à des bagues de plomb qui chargent la ralingue inférieure et les poissons viennent se «mailler » dans le filet.
A la différence des pêcheurs de l'Atlantique, les Algériens n'emploient pas la «rogue », l'appât destiné à attirer les poissons mais simplement cherchent à «leur faire peur », à les précipiter vers le filet. C'est une pêche assez délicate car il faut tenir compte du courant, du vent, des mouvements du poisson. Son rende¬ ment est assez faible, le démaillage est long, mais le poisson est en bon état, et «calibré » pour la grande joie des usiniers. Aujourd'hui, le sardinal est peu employé et a été remplacé presque partout par le lamparo. Cependant, comme il donne du très beau poisson, on le mouille encore quelquefois.
Vers 1870, les Italiens venant pêcher sur les côtes de l'Algérie commencèrent à utiliser un autre filet flottant, le lamparo, dont le rendement s'est montré bien supérieur. Ce filet comprend en général une vaste poche à mailles fines de 180 mètres de long, et 2 ailes triangulaires à mailles plus larges, de 80 mètres chacune (20). Avec le lamparo, il n'y a plus maillage du poisson mais encerclement des bancs. Profitant d'une nuit sombre, on se met à la recherche du poisson. De temps en temps, un matelot frappe l'eau avec une rame : s'il y a du poisson, il trahira sa présence par un brusque mouvement marqué dans l'eau par une sorte de phosphorescence. Sans bruit, les marins mouillent alors le filet en décrivant un cercle autour du banc repéré; puis ils tirent rapidement sur les ailes, le poisson fuit vers la poche qui se ferme et il suffit ensuite de tirer à bord la masse agonisante des petits poissons bleus. Le lamparo exige un travail plus dur que le sardinal. Trois hommes au moins sont nécessaires pour tirer chaque bout du filet. Par suite, au bateau « sardinal » de 6 à 7 mètres a succédé le bateau « lamparo », un peu plus grand. Les premiers lamparos venaient d'Italie ou d'Espagne; ils sont tous aujourd'hui construits en Algérie, mais les deux types subsistent. Le lamparo «italien » a 8 ou 9 mètres de long et une largeur très faible, moins du tiers de la longueur. Le lamparo espagnol, plus trapu, plus commode, avance moins bien à la rame. » (p.178-179)
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via hacine-bouharoun 02 |
Les commentaires et compléments
Les données fournies par ces différentes "pages web" sont difficilement vérifiables car aucune bibliographie n'est fournie. Elles jouent le rôle de "témoignages" avec la relativité... Le dernier texte, de bonne qualité rédactionnelle, est difficilement vérifiable, sa justesse est - à la manière de Wikipedia - seulement attestée par les multiples "commentaires" qu'il suscite sur les nombreux sites où il a été recopié. Les remarques sont nombreuses et comprennent les habitants actuels de Bou-Haroun, comme un restaurateur de fruits de mer qui se désole de l'état dans lequel se trouve aujourd'hui le port du village, ou le témoignage plus enthousiaste d'un photographe de la région qui renvoie les lecteurs vers son propre site (hacine-bouharoun) déposé sur skyrock.com... Parmi les sites qui rééditent le texte, celui de Tpaza (tipaza.typepad.fr) : il reprend l'histoire en 2010, y ajoute une image de la sardinerie Ampart avec sa vingtaine de chaloupes et conclut laconiquement :
L'œuvre peu connue de ces hommes est encore perceptible aujourd'hui sur les côtes d'Algérie. Leur savoir-faire a été simplement transféré sur les anciens descendants de cette époque pionnière. Pour remettre en mémoire ce monde maritime d'une autre époque, il fallait peut être mettre des mots là où il n'y en avait pas encore.
Mais le plus complet des ajouts se trouve est algeroisementvotre , une autre page HTML non-datée, anonyme, déposée sur free.fr qui redonne un texte proche, avec quelques apports sur la fin tragique de cette histoire au moment de la décolonisation :
Puis vint le 19 Mars 1962... Le premier événement arriva brisant la belle entente qui régnait au village ... Le Lundi de Pâques, une grenade lancée dans le café Piris. Le 19 mai, Raphaël de Crescenzo est enlevé. Le 6 juin, c'est Emile Ampart. Comme tous les nombreux disparus de cette fin de guerre d'Algérie, leur enlèvement laisse une plaie toujours béante au sein de leurs familles. Le 5 juin 1962, Afin de ne pas devenir des étrangers dans le pays où ils sont nés, les pêcheurs de Bou-Haroun, après une périlleuse traversée de la Méditerranée se retrouvèrent dans les ports : du Roussillon, du Languedoc, de la Provence.
Un récit plus complet est donné par un autre blog, le site d'Yves Bandet yves.bandet déposé sur Free.fr en 2007, extrait d'un ouvrage d'Edgar Scotti et de Joseph Palomba, dans une page consacrée à l'exode (non datée) :
"BOU-HAROUN mai, juin 1962 Depuis quelques jours le bateaux ne sortent plus. Serrés les uns contre les autres sur la plage, ils sont l'objet de toutes les attentions de leur équipage désoeuvrée. Fruit de efforts persévérants de plusieurs générations de pêcheurs, ces chalutiers aujourd'hui ne servent plus à rien. Le poisson ne se vend pas, les routes sont peu sûres et dans le villes et même les villages, c'est le départ massif de ceux qu'un ministre de la République appelle les « vacanciers ». épargné jusqu'au lundi de Pâques 1962, le village a ensuite connu le terrorisme, avec une grenade lancée dans le café Piris et une bombe à la villa Borja. Le 19 mai, Raphaël de CRESCENZO est enlevé. Le 6 juin c'est au tour d'Emile AMPART, raflé dans son usine. Détenus tous les deux à Mouzaïville, ils y seront fusillés avec beaucoup d'autres, malgré les rançons désespérément offertes par Mme AMPART aux dirigeants de l'armée algérienne de Koléa. Un vent de terreur souffle sur Bou-Haroun et sur l'Algérie. L'avenir est bien sombre. Assis sur le plat-bord d'un chalutier, les pêcheurs s'interrogent. Comment peut-il se faire que l'on devienne étranger sur cette terre où l'on est né, qui fut celle de nos parents ? Ne serait-il pas temps de profiter de nos bateaux pour faire passer quelques meubles de l'autre côté de 1a Méditerranée ? Cependant, les cales si difficiles à remplir en poisson se révèlent bien vite insuffisantes. Enfin arrivés là-bas, il faudra bien pécher. Le matériel devient dès lors prioritaire."
Les Forums de Filae indiquent quelques noms en relation avec l'usine. EN 2006, un File sur "Chiffalo en Algérie", précise (filae.com)
Nathalie.F218 / 19/03/2006 Messages: pour patricia merci pour l'adresse du site ca ma fait plaisir. connait tu peut etre l'usine de sardine ampart ma grand mere etaitcontre maitresse son nom de jeune fille est COSTANZO jeanne si tu as d'autres renseignement sur bou haroun peut tu m'en faire part merci beaucoup et si tu as des question pose moi les mes soeur on vécu en algérie elle pourrons peut etre te repondre biz nathalie
Un "File" intitulé "Recherches sur Bouharoun" datant du 20 mai 2008, dans Filae (filae.com) :
Marie-Jeanne. /13 septembre 2008 09:07 Messages : bonjour a vous tous!! je suis née a bou-haroun! le 30 06 1949!fille de vincent fornet , petite fille de jeanne costanzo epouse fornet joseph.. j'aimerai vous rappeler que ma grand-mere jeanne a toujour tavailler a l'usine de monsieur ampart!! comme contremaitresse!!elle aimait son travail et tout les gens de son village!!!monsieur ampart etait un homme bien!! les paroles que ma grand mere nous a laisser!!s'il vous plait est ce que vos parents l'on connu!! j'attend des reponses..merci beaucoup!! je me prenome marie-jeanne..j'aimais beaucoup ma grand-mere..je l'aime toujour encore
E. Devanne / 30 mai 2012 / Messages: Juste pour vous dire que je suis l'arrière-petite-fille de Timothéé Ampart pour qui travaillait votre grand-mère. Amitié. Elisabeth
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Les pêcheries marocaines, 1948 - préparation des sardines et mise en boîte par des femmes "indigènes" |
Quelques films relatant la pêche à Bou-Haroun
Les films de cette période aujourd'hui consultables sur la base de donnée de l'INA , sur Bouharoun est non seulement improbable, mais elle aurait aussi été imprécise... La réalisation de ces premières productions étant extrêmement coûteuses, les sujets sont excessivement généralistes et les journalistes s'apparente plus à des pédagogues qu'à des reporters. Le ton est comparable à celui des ouvrages scolaires du XIXe siècle : on y explique la pêche en Algérie dans le même esprit que l'auteur du Littoral de la France décrivait le village d'Audierne.
Il s'agit d'un "medium flou", de vulgarisation, voire de propagande, présentant un contenu qui ne permet absolument pas de se figurer les détails d'une vie individuelle ou familiale. Seule la représentation de "grands événements" transparaît, comme l'exode des "pieds-noirs" et la guerre d'Algérie (les "événements" pour utiliser l'euphémisme du moment). Il en est de même du premier web, encore "informatif", où chacun témoignait autour de ces grands événements.
Texte où il est question de l'héritage d'une société, de la perception des colons, du passage du socialisme radical au "fascisme" de l'OAS, la mort des otages du FLN, le "retour" vers la France.
Le regard des historiens conduit aujourd'hui à réinterpréter les "invasions barbares" et les "raids vikings" comme des flux de migration ou des modes d'échanges. Parfois excessive, cette contre-interprétation se retrouve dans la colonisation, lorsque les autorités politiques des pays colonisateurs soulignent un "rôle positif"... Le point Godwin est vite franchi par les opposants prenant le parti des pays colonisés pour comparer l'événement avec l'arrivée des nazis ! Difficile d'être neutre quand l'histoire est encore chaude. S'il est évident que les "indigènes" sont peu ou pas concernés par ces fameux "apports" (école, routes, administrations, industries), ils en profiteront par la suite. Faut-il résumer le débat en affirmant que l'apport positif de la colonisation, pour les colonisés, réside dans la décolonisation ! C'est la morale que l'on peut tirer de l'installation de l'usine Ampart à Bouharoun, avec un départ des "colons" qui se fait dans la violence...
Plutôt qu'une invasion ou un raid, la colonisation apparaît dans ce micro-récit historique comme l'amorce d'une mondialisation impliquant des "industriels" bretons (qui apportent un savoir-faire) associés à une main d'oeuvre "locale", elle-même d'origine espagnole et italienne. La neutralité historique n'est ni celle d'une invasion, ni celle d'une assimilation, plus simplement l'apport d'une technique dans un territoire jusqu'ici inexploité...
Voici ce que dit Wikipedia de Bouharoun : "Le village de pêcheurs de Bou Haroun sera constitué à partir de 1883 par des pêcheurs espagnols de Minorque et des Italiens de Naples, Procida et Ischia. Les maisons en dur ne sont construites qu'à partir de 1905. Dépendant de Tefeschoun, Bou Haroun devient une commune de plein exercice au début du xxe siècle. À l'indépendance elle sera intégrée dans Bou Ismail avant d'être recréée en 1984." Oubliant évidemment le passage à l'industrialisation par des colons, qui marque probablement la véritable naissance du village !
La décolonisation s'avère particulièrement violente : l'un des descendants, qui dirigent toujours la conserverie, Emile Ampart, aurait été membre de l'OAS ; il est fusillé par le FLN en 1962. Le reste de la famille s'est rapatriée vers Royan, la Corse, la Bretagne... Quant aux pécheurs d'origine espagnole et italienne, beaucoup sont des "pieds noirs" et certains partagent encore sur internet leurs souvenirs de Bou Haroun et de l'usine Ampart.
ci-après, extrait d'un blog...
Quelques cartes postales montrant l'évolution du village...
Léon, Antoine. Marins de commerce et pêcheurs d'Alger en 1930. In: Revue française d'histoire d'outre-mer, tome 83, n°313, 4e trimestre 1996. pp. 53-75.
Les pêcheries marocaines, 1948 (ina.fr)
Après une introduction pontifiante bourrée de banalités, que le dernier des poètes romantiques n'aurait pas osé déclamer un siècle auparavant, le journaliste vante la grandeur de l'industrie française en vantant "les méthodes rationnelles de la détection scientifique" (3'55''), évoque la diveristé des
La tempête de 1951
La tempête de 1951
La base INA ne décrit qu'un évènement, degré zéro de l'information, une vidéo de 2 mn datée du 20 octobre 1951 : "- La mer démontée avec bateaux ballottés et vagues passant au-dessus des digues - Piétons sur un pont, luttant contre le vent - Grosse vague sur une digue - Bateaux réfugiés dans un port - Effets de vagues et forme de gerbes sur une digue - Piétons luttant contre le vent sur un pont - Femmes arabes voilées luttant contre le vent sur un pont - VG d'un chalutier échoué sur un rivage, à BOU-HAROUN - Arbres arrachée en bordure d'une route (2 plan) - Le pont de BOU-ROUMI emporté par les eaux - Routes bordées d'arbres coupées par les eaux (3 plans) - Poteau indicateur : "CAMP DES CHENES-MEDEA" émergeant de l'eau - Voiture automobile circulant dans l'eau sur une route - Route bordée d'arbres, inondée - Circulation de cyclistes dans l'eau."
Le regard des historiens conduit aujourd'hui à réinterpréter les "invasions barbares" et les "raids vikings" comme des flux de migration ou des modes d'échanges. Parfois excessive, cette contre-interprétation se retrouve dans la colonisation, lorsque les autorités politiques des pays colonisateurs soulignent un "rôle positif"... Le point Godwin est vite franchi par les opposants prenant le parti des pays colonisés pour comparer l'événement avec l'arrivée des nazis ! Difficile d'être neutre quand l'histoire est encore chaude. S'il est évident que les "indigènes" sont peu ou pas concernés par ces fameux "apports" (école, routes, administrations, industries), ils en profiteront par la suite. Faut-il résumer le débat en affirmant que l'apport positif de la colonisation, pour les colonisés, réside dans la décolonisation ! C'est la morale que l'on peut tirer de l'installation de l'usine Ampart à Bouharoun, avec un départ des "colons" qui se fait dans la violence...
Plutôt qu'une invasion ou un raid, la colonisation apparaît dans ce micro-récit historique comme l'amorce d'une mondialisation impliquant des "industriels" bretons (qui apportent un savoir-faire) associés à une main d'oeuvre "locale", elle-même d'origine espagnole et italienne. La neutralité historique n'est ni celle d'une invasion, ni celle d'une assimilation, plus simplement l'apport d'une technique dans un territoire jusqu'ici inexploité...
Voici ce que dit Wikipedia de Bouharoun : "Le village de pêcheurs de Bou Haroun sera constitué à partir de 1883 par des pêcheurs espagnols de Minorque et des Italiens de Naples, Procida et Ischia. Les maisons en dur ne sont construites qu'à partir de 1905. Dépendant de Tefeschoun, Bou Haroun devient une commune de plein exercice au début du xxe siècle. À l'indépendance elle sera intégrée dans Bou Ismail avant d'être recréée en 1984." Oubliant évidemment le passage à l'industrialisation par des colons, qui marque probablement la véritable naissance du village !
La décolonisation s'avère particulièrement violente : l'un des descendants, qui dirigent toujours la conserverie, Emile Ampart, aurait été membre de l'OAS ; il est fusillé par le FLN en 1962. Le reste de la famille s'est rapatriée vers Royan, la Corse, la Bretagne... Quant aux pécheurs d'origine espagnole et italienne, beaucoup sont des "pieds noirs" et certains partagent encore sur internet leurs souvenirs de Bou Haroun et de l'usine Ampart.
ci-après, extrait d'un blog...
Quelques cartes postales montrant l'évolution du village...
Bibliographie en ligne
Léon, Antoine. Marins de commerce et pêcheurs d'Alger en 1930. In: Revue française d'histoire d'outre-mer, tome 83, n°313, 4e trimestre 1996. pp. 53-75.
Bibliographie à domicile
Palsky, Gilles. « Un monde fini, un monde couvert », pp. 131-145 in: Poutrin Isabelle (dir.), Le XIXe siècle. Science, politique et tradition, Paris, Berger-Levrault, 1995, 534 p.,
site d'Hubert Zakine : "A cette époque, l'Algérie se trouvait au confluent de plusieurs courants migratoires. Dès le 6 juin 1831, Ferrer Jéronomo, originaire de Calpé arrive à Bou-Haroun, les hommes viennent seuls, ils s'abritent à côté de leur bateau, dans de pauvres cabanes de roseaux ou de planches ou parfois dans des grottes. La sécurité s'améliorant les femmes ne tardent pas à les rejoindre, contribuant à l'amélioration de leur confort ménager. De nombreuses familles originaires d'Espagne continentale et des îles Baléares, notamment de l'île de Minorque éprouvée par une sévère crise économique, arrivent sur la côte. Bien connu des Italiens du royaume des Deux-Siciles, le littoral voit arriver des émigrants originaires de la région de Naples et des îles de Procida et d'Ischia dont l'économie était complètement ruinée par le séisme de 1883. Un membre de la famille Ruotolo aurait été le premier à tirer son bateau sur la plage de Bou-Haroun. Il y sera suivi par beaucoup d'autres. Installés sommairement dans de petites maisons édifiées sur le domaine maritime, peu mobiles, ayant de nombreux enfants et de vieux parents, ces hommes habitués aux caprices de la Méditerranée, à ses redoutables grains accompagnés de grosses pluies orageuses, résistent aux difficiles conditions de vie et de travail sur leurs palangriers."
Webographie
site d'Hubert Zakine : "A cette époque, l'Algérie se trouvait au confluent de plusieurs courants migratoires. Dès le 6 juin 1831, Ferrer Jéronomo, originaire de Calpé arrive à Bou-Haroun, les hommes viennent seuls, ils s'abritent à côté de leur bateau, dans de pauvres cabanes de roseaux ou de planches ou parfois dans des grottes. La sécurité s'améliorant les femmes ne tardent pas à les rejoindre, contribuant à l'amélioration de leur confort ménager. De nombreuses familles originaires d'Espagne continentale et des îles Baléares, notamment de l'île de Minorque éprouvée par une sévère crise économique, arrivent sur la côte. Bien connu des Italiens du royaume des Deux-Siciles, le littoral voit arriver des émigrants originaires de la région de Naples et des îles de Procida et d'Ischia dont l'économie était complètement ruinée par le séisme de 1883. Un membre de la famille Ruotolo aurait été le premier à tirer son bateau sur la plage de Bou-Haroun. Il y sera suivi par beaucoup d'autres. Installés sommairement dans de petites maisons édifiées sur le domaine maritime, peu mobiles, ayant de nombreux enfants et de vieux parents, ces hommes habitués aux caprices de la Méditerranée, à ses redoutables grains accompagnés de grosses pluies orageuses, résistent aux difficiles conditions de vie et de travail sur leurs palangriers."
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