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Vigne historique de l'ancien collège [648 car. / 777 sgn]
Plantée lors de l'installation des Jésuites au début du XVIIᵉ siècle, cette vigne est l'une des plus anciennes du monde et détient le record de longévité pour le raisin blanc.
Ultime représentante du cépage « verjus blanc », son nom désigne un jus acidulé incontournable dans la cuisine et la médecine médiévale. Un traité du XVIᵉ siècle, L'Agriculture et Maison rustique de Charles Estienne, précise : « la plus commune façon de faire verjus [...] eſt de cueillir les grappes vertes des raiſins de treilles. » Il fallait ensuite les presser, puis saler pour la conservation.
Ce jus va être progressivement remplacé par celui des citrons ou des oranges ; mais cette vigne continue d'être utilisée en ornement, comme l'indique le Traité du jardinage de Jacques Boyceau en 1638.
- Les illustrations :
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- Grand dictionnaire de l'Académie, 1695, p.326 URL : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k12804393
TEXTE : VERJUS. f. m. Le jus, le fuc qu'on tire de certains raifins quand ils font encore tout verts. Acad. Fr. Les Grecs appellent le Verjus iυàxov, & Diofcoride dit que l’Omphacium eli le Verjus des raifins des vignes Thafiennes ou Aminéennes, & que pour bien faire ce jus, il le faut tirer des raifins avant les jours Caniculaires , & le mettre fecber au Soleil dans un vaifleau de bronze ou de rofette qui foie couvert d’un linge. îlajoufteque le meilleur eft celuy qui eft roux, frefle, fort piquant &aftringencau gouft. Matthiole dit qu’au defaut des raifins Thafiens & Aminéens , donc les Anciens compofoient leur Verjus, en le faifant fecher au Soleil, on en fait en Ita lie de toutes fortes d’autres raifins, &que quelques-uns voulant en avoir de bon, non feulement pour s’en lervir en Medecine, mais auffi pour donner du gouft aux viandes, le font de grappesde lambrufque. Selon Galien , le Verju9eft bon à toutes forces de maladies chaudes. Comme il eft tout-à-fait aigre, i! ne peut eftreque refngeratif & profitable à toutes ardeurs, (oit qu’on l’employé à l'orifice de i’ef- comac, ou aux flancs , ou à quelque partie du corps que ce foie qui ait befoind’etre rafraîchie. Le Verjus ne différé du vin qu’à caufe que fa chaleur eft moindre. Comme cette chaleur eft iegere, & qu’elle digéré moins les parties terreftres qu’il contient, cela le fait participer quelque peu de la fa veut auftere. Quoyque Galien ait dit qu’ileff aigre, il ne peut pourtant penetrer profondément comme le vinaigre, n’ayant en foy aucune chaleur ny acrimonie, mais feule ment une forte aftridion.
Bibliographie
- André Jacquinet, "Histoire de l'église et de la paroisse Saint-Maurice de Reims", Travaux de l'Académie nationale de Reims, Imprimerie Coulon, 1972, 303 p.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9791027z
- Michel Royer, Aux Temps modernes, la rivalité entre les deux collèges rémois, septembre 2021
- Merlet, Jean, L'Abregé des bons fruits, A Paris, chez Charles de Sercy. M.DC.LXVII, 1667, p.132. URL : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8720184w
- Andrieux, Pierre, Catalogue raisonné des plantes, arbres & arbustes, Andrieux (Paris), 1771, p.7. URL: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6201861f
"Vitis acino majore, ovato, e viridi flavescente, Burdigalensis. dicta.
LE BOURDELAS, Bordelais ou Verjus, a des grappes extrêmement groſſes. Les grains ſont oblongs, couverts d'une peau très-dure, d'un vert clair tirant ſur le jaune. La chair en eſt aſſez ferme ; l'eau abondante & acide devient douce & agréable dans la maturité; mais on ne l'emploie guère que vert en ce pays."
- Chaptal, Jean-Antoine, Traité théorique et pratique sur la culture de la vigne. Tome 1, rééd. 1801. URL : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1527541r
Le Verjus. Vitis acino majore ovato è viridi flavescente, Burdigalensis dicta, — Cette race, qu’on nomme ordinairement Verjus, Grey, Grégeoir dans les départemens du centre et du nord de la France , parce qu’elle n’y mûrit pas et qu’on ne l’emploie guère qu’à extraire sa liqueur pour former le verjus, d’un si grand usage dans la cuisine, est aussi connue sous les noms de Bordelais et Bourdelas. Dans la liste que j’ai sous les yeux, de tous les cépages cultivés aux environs de Bordeaux, je ne vois que le Prunelas ou Chalosse, appelé à Clairac Œil de-Tourde, qui puisse lui être assimilé. Mais il mûrit si complettement dans le territoire de Bordeaux, que le grain se détache souvent de la grappe avant la vendange. Les bons économes ne manquent pas de recommander aux vendangeurs de le ramasser exactement. Ses grains, oblongs, sont très-gros et composent des grappillons qui forment, par leur réunion , de très-grosses grappes. Sa feuille est ample, presque ronde, et très-sensible à la gelée : c’est peut-être à cette extrême délicatesse qu’il faut attribuer son peu de maturité dans les contrées où les gelées sont hâtives. Un raisin de ce pépin semé, il y a plusieurs années, dans le jardin très-connu du chevalier Jansen, à Chaillot, près Paris, a produit une variété dont le fruit parvient à la maturité la plus complette; ses sarmens poussent avec une vigueur extrême, et couvrent déjà une grande étendue de muraille. Le fruit de cette variété est excellent; elle porte, on ne sait pas trop pour quoi, le nom de Vigne aspirante.
- Yves-Marie Allain, De l'orangerie au palais de cristal, une histoire des serres
Article de l'Union
Grégoire Amir-Tahmasseb, "La plus vieille vigne de raisins blancs du monde à Reims", L'Union, 16/12/2012
"Une étude ADN sur les pieds de vignes se trouvant dans l'ancien collège des Jésuites de Reims permet désormais de dater leur origine à plus de quatre siècles. Il s'agit sans doute de la plus ancienne vigne de raisin blanc du monde. Et contrairement à ce que tout le monde pensait, son cépage n'est pas du Marawi mais du Verjus, un cépage qui avait disparu. Ils revendiquaient le statut de plus vielle vigne de France. Dorénavant, la référence est mondiale.
Les pieds de vigne de l'ancien collège des Jésuites à Reims sont en effet là depuis près de quatre siècles pour trois d'entre eux. Classées monuments historiques, ils ont été plantés entre 1610 et 1650 et sont « les plus anciens pieds de vigne de raisins blancs du monde », dixit Jacques Cohen, adjoint au maire de Reims en charge notamment du patrimoine. La précision de la couleur a son importance. Car si tous les livres font référence à des vignes situées à Maribor en Slovénie comme « plus vieilles vignes du monde », elles datent de la fin du XVIe, celles-ci produisent du raisin noir. Pour le blanc, aucun écrit ne stipule à ce jour de pieds plus anciens que ceux situés dans l'ancien collège des Jésuite à Reims. L'histoire veut que dans la première moitié du 17e, des pères Jésuites du collège de Reims partis dans une de leurs missions à Ashkelon en Palestine (aujourd'hui Israël), rapportèrent à Reims des pieds de vigne qu'ils plantèrent dans leur cour. Au fil des ans, même s'ils ont résisté à la crise du phylloxéra à la fin du XIXe siècle, ses pieds ont commencé à dépérir. C'est ainsi qu'en 2011, un groupe de « Sages » composé de la Ville, de l'architecte des Bâtiments de France, d'œnologues a été mis en place pour se porter au chevet de la vigne. Outre son entretien, ils se sont lancés dans une vaste étude scientifique afin d'en comprendre l'origine, de la comparer avec celle d'Ashkelon qui existe toujours. Pour cela, ces experts ont fait parler les vignes rémoises et israéliennes avec des analyses ADN poussées.
Un cépage disparu retrouvé
Les premiers résultats qui viennent d'être présentés bouleversent de nombreuses idées reçues. Les principales concernent le cépage des vignes de l'ancien collège et leur provenance. Lorsque la vigne des Jésuites a été classée il y a une vingtaine d'années, la forme de ses feuilles et de ses grappes avaient poussé les experts à parler de Marawi, un cépage connu au Moyen-Orient qui correspondait finalement bien avec l'histoire des pieds ramenés par les Jésuites au XVIIe. Petit souci, l'analyse ADN sur neuf échantillons prélevés sur des pieds anciens montre de façon formelle que le cépage de la vigne de l'ancien collège des Jésuites de Reims n'est pas du Marawi mais du Verjus ! Une belle découverte finalement, car ce cépage n'existait plus, jusqu'à présent, que dans des textes. Second souci, les mêmes analyses ADN réalisées sur les vignes d'Ashkelon ne retrouvent pas la moindre trace de cépage Verjus là-bas. Si la datation des vignes rémoises ne fait aucun doute, la belle histoire des vignes rapportées du bout du monde par les Jésuites est peut-être beaucoup plus banale. Les pieds du XVIIe pourraient finalement très bien venir de la région, de France. « C'est une possibilité mais l'histoire d'Ashkelon est tout aussi crédible », souligne Jacques Cohen. « Le Verjus a disparu partout et il a très bien pu disparaître également en Israël. Peut-être est-il encore présent mais nous ne l'avons pas encore trouvé car nous sommes seulement au début de l'inventaire. » Le mystère de la provenance de ces pieds historiques reste donc entier.
- voir aussi
https://acsireims.wixsite.com/vignes-archaiques/Wines
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