L'ouvrage Champagne ! par Wolikow rouvre les pistes pour sortir des légendes commerciales et intégrer une véritable histoire où le négoce ne débute pas vraiment avant la Révolution. Les maison qui se prétendent plus anciennes ne parlent en réalité que de ventes de quelques centaines de bouteilles rachetés à des moines et revendues sur les grandes tables de la haute noblesse... Un traffic négligeable pour des gens plutôt spécialisés dans les draps. C'est ce qui est raconté dans :
MUSSET Benoît , Vignobles de Champagne et vins mousseux. Histoire d’un mariage de raison (1650-1830), Paris, Fayard, 2008
GOUJON Bertrand, Entre France et Allemagne, les grands négociants en vins de Champagne : approches transfrontalières d’une élite patronale au cours du long XIXe siècle, 2017. https://shs.hal.science/halshs-01553651
Les preuves matérielles de l’histoire du champagne à Reims… Comme le fait entendre Offenbach « Le vin qui mousse à travers la Champagne. Me rendra fou ! » L’historiographie du champagne est excessivement légère, puisqu’elle tient de l’art de se faire mousser. Dans une ville qui se réinvente depuis le baptême de Clovis, les maisons de champagnes cultivent l’hagiographie et chacune s’attribue la première place, en inventant la prise de mousse, le remuage, l’extra-dry, la forme d’une bouteille, ou le commerce avec telle reine, tel roi, tel royaume… Certes, Louis XV a su faire du « vin mousseux » de Champagne un symbole de luxe et de libertinage, mais comment matérialiser cette épopée de l’unique et du véritable champagne ? D’autant plus que de nombreuses archives ont disparu pendant la Grande Guerre, ou restent dans les fonds privés des grandes maisons.
Le patrimoine architectural offre une donnée visible, permettant de quantifier le succès de ce vin en observant la ville. Un fait s’avère certain, les négociants se procurent au XVIIIᵉ siècle leur vin auprès des moines des abbayes. Du point de vue financier, la première fortune qui impacte l’apparence de la ville est celle de Jean Godinot (1661-1749), un texte de 1751 précise à son sujet : « Chanoine si célébré par le bon vin mousseux de Champagne avec lequel il avoit gagné des sommes immenses.Ce qui lui permet de participer financièrement au réaménagement de la ville, de créer un hôpital et des fontaines, dont il reste une local pour machine élévatrice associée à un château d’eau, sans doute l’un des plus anciens du monde…
La Révolution, l’émigration des nobles et la saisie des biens du Clergé rebattent certainement les cartes, mais les patrimoines restent invisible car les quantités en questions restent négligeables avant les années 1820-1830 où elles commencent à devenir industrielles. C'est à cette époque que les grands négociants du textile - comme Ponsardin et Pommery - commencent à creuser des caves à proximité de leurs hôtels particuliers. Il reste difficile d’établir un récit à partir de ces preuves matérielles, car il est trop bref. Enfin, il s’inscrit dans des mythes complétement opposés à ceux d'une tradition anarcho-syndicaliste datant du début du XXe siècle (qui s’exprime localement dans la Révolte des vignerons en 1911) et tend à opposer la ville à la campagne, le vigneron et le négociant, l’artisanat et l’industrie.
Mais cette seconde histoire concerne très peu le patrimoine rémois, car le négoce se porte particulièrement bien pendant la crise ! Mieux vaut se concentrer sur les occurences des grandes Maisons de champagne dans la bibliographie (Gallica) pour voir émerger cette "industrie"... ci-après :
La première occurrence de "vin de champagne" se trouve dans Le Monde, ou La description générale de l'Europe, quatre partie du monde. Tome 2 / Avity, Pierre d' (1573-1635). Il s'agit d'un vin non-pétillant bu dans la région (dans le Retelois)
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5774657q p.240
Il s'agit d'interroger le premier "noyau apparu dès le règne de Louis XV (Ruinart en 1729, Chanoine en 1730, Moët en 1743, Vander Veken – aujourd’hui Abelé – en 1757, Delamotte – aujourd’hui Lanson – en 1760 et Clicquot en 1772)" (Goujon) + manque Forest-Fournaux (Taittinger)
L'occurence "Clicquot- Ponsardin" débute en 1821, publié dans le Journal du commerce, 22 février 1822 (retronews)
La première liste est donnée Almanach du commerce de Paris en 1827
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6292888w p.524 ;
Andrieux (Fl.) ;Assy-Olivier et co. ; Auger-Godinot ; Benoist jeune, et prop. à Mailly et Sillery ; Bertherand-Sutaine et co ; Brice,, et bois ; Clicquot- Ponsardin (Vve) ; Couvert ; Delamotte père * et fils (Ls) ; Dorlodot Druart. , Forest- Fournaux père et fils ; Gadiot-David ; Gienanth et co. ; Gosset, prop. à Ay ; Gros-Choisy ; Heidsieck et co. ; Heuser ; Huet (Vve) ; Huraut-Assy ; Irroy (Benjamin et Saturnin) , entrep. à Paris [...] ; Jacob et co. ; Lecointre (Auguste) ; Lemoine-Huet , prop. à Verzenay et à Sillery ; Leroux aîné et co. ; Levieux-Balon ; Maillefer-Ruinart * ; Magloire-Leroux ; Moreaux-Rohart ; Moriset ; Moriset-Huet ; Moignon-Alisse ; Muller-Ruinart ; Restaud-Mennesson ; Romagny-Boulanger, prop. à Ay. ; Ruinart père et fils ; Schreider (N.-H.) et co. ; Soyer (E) ; Vander-Veken père et fils. ; Wibert et Droinet.
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